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Dans un monde du travail en mutation constante, ou les transformations se succèdent et s’accélèrent, il est urgent pour les entreprises, les organisations, de remettre le travail au cœur des débats, au cœur des équipes. Les espaces de discussions, portés notamment par l’ANACT (1), peuvent être un levier pour permettre aux équipes d’être actrices de leur propre qualité de vie au travail. Ces espaces suscitent un intérêt croissant, au sein des organisations. Cependant, ils sont souvent confondus avec les groupes de travail, les réunions, le co-développement ou encore les retours d’expériences. Afin de mieux comprendre cet outil, cet article répond à quelques questionnements : Qu’est-ce qu’un EDD ? Pourquoi les mettre en place ? Quelles sont les clés de l’animation d’un EDD ? Quels sont les éléments essentiels pour assurer le succès de cette démarche ?
L’espace de discussion est un outil qui permet de renforcer la démarche QVCT et de prévenir les risques psychosociaux, au sein de l’organisation. Cet outil a été préconisé dans l’accord National Interprofessionnel de 2013 et 2020.
Les espaces de discussion sur le travail (EDD) sont des espaces d'expression collectifs de professionnels sur leur travail, dans un cadre défini, institutionnalisé et régulier, visant à agir concrètement sur la qualité du travail au bénéfice de l'individu, du collectif et de l'organisation. Le collectif va réfléchir ensemble, sur son activité, son organisation, les règles du métier, tout simplement la réalité du travail au quotidien.
Il s’agit d’élaborer des dispositifs favorisant des discussions régulières sur les conditions concrètes de réalisation des activités. L’objectif est de rendre visible le travail effectué et ses difficultés, tout en redonnant aux équipes le pouvoir d’agir sur leur travail et sur l’organisation (Clot (2), 2008).
Plusieurs études ont démontré l’intérêt des espaces de discussion dans la prévention des risques psychosociaux et le déploiement d’une démarche QVCT (De Chatillon et Desmarais, 2017 (3) ; Detchessahar, 2013 (4) ; Laborie et Abord De Chatillon, 2024 (5) ; Detchessahar et Gentil, 2024 (6) ).
Mettre en place un EDD permet à celles et ceux qui font le travail de parler sur leur réalité de travail pour faciliter la régulation du travail, la résolution de problème ou encore d’enrichir les pratiques professionnelles. Ainsi, ils peuvent faire face aux transformations du travail, en devenant acteurs de leurs conditions de travail. C’est d’autant plus important dans les contextes de transformation. Ce sont des périodes instables, souvent pleines d’incertitudes qui vont venir modifier les conditions de travail des salariés ou des agents.
Les bénéfices des EDD sont nombreux : se sentir écouté et reconnu, rompre l’isolement des managers de proximité qui échangent et décident avec leurs équipes, ou encore faire évoluer et ajuster des situations de travail rencontrées.
L’animateur est un facilitateur, il porte la parole du groupe, il est plus garant de la forme, de la méthodologie que du contenu. Son rôle, c’est de gérer le temps et éventuellement la prise de note. Il doit faire attention à centrer les échanges sur l'objectif initial fixé.
Afin que les participants s’expriment librement et participent de manière active, il est préconisé que l’animateur instaure un climat de confiance. Pour y arriver, il peut s’appuyer sur une méthodologie structurée et collaborative, avec une posture neutre et une répartition du temps de parole de manière assez équilibrée.
Pour éviter que les échanges lors de l’EDD ne deviennent des plaidoiries, des plaintes ou des revendications, l’animateur peut consacrer une dizaine de minutes au début de l’atelier pour définir clairement le cadre, co-construire les règles de fonctionnement avec les participants, aborder la notion de confidentialité et clarifier la finalité. Par exemple, dire clairement que l’objectif n’est pas de s’arrêter uniquement sur le constat, mais d’agir sur la façon de travailler, de proposer des idées d’actions pour faire avancer les choses, voire de prendre des décisions concrètes !
L'animateur doit être en mesure d'écouter activement les échanges, de poser des questions pertinentes pour approfondir les propos et stimuler les idées d'actions. La reformulation peut être utilisée pour s'assurer de la compréhension des interventions, mais aussi pour relancer les discussions et créer une dynamique d'intelligence collective.
Pour assurer le succès de cette démarche, il est essentiel de se former à l'animation des espaces de discussion, depuis la création d'un EDD jusqu'à son suivi. L'ingénierie des EDD est un aspect à ne pas négliger pour éviter des écueils.
L'engagement de la direction est important, tout comme la co-construction des règles de fonctionnement et des objectifs avec les parties prenantes. Ce qui contribue à renforcer le lien de confiance avec les participants.
Sans oublier, que l’EDD sert à transformer le travail, à proposer du concret et à construire des pistes d'actions.
Ne tardez pas à intégrer les espaces de discussion dans votre quotidien professionnel. Chaque pas contribue à améliorer la qualité des interactions, et la satisfaction au travail.
Rédaction : Hajar Jerdioui
Notes de bas de page :
1. Agence Nationale pour l'Amélioration des Conditions de Travail
2. Clot, Y. (2008). Travail et pouvoir d'agir. Presses universitaires de France.
3. De Chatillon, E. A., & Desmarais, C. (2017). Espaces de discussion, management et épuisement professionnel. @ GRH, 23(2), 13-36.
4. DETCHESSAHAR, M. (2013). Faire face aux risques psycho-sociaux : quelques éléments d’un management par la discussion. Négociations, (1), 57-80.
5. LABORIE, C., & ABORD DE CHATILLON, E. Les espaces de discussion du travail: des outils de régulation salutaires pour la santé, la performance et l’implication des télétravailleurs. Management international (Montréal), 2024, p.1-26.
6. Detchessahar, M., & Gentil, S. (2024). Ouvrir le dialogue sur le travail, renoncer à l’immunité bureaucratique?: Réflexions à partir d’une recherche-intervention en milieu hospitalier. Revue française de gestion, 318(5), 39-61.
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